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Voyager autrement en famille : comment, pourquoi
Pour la première fois de ma vie, je partais il y a quelques semaines m’immerger dans la marmite du voyage solidaire au Bénin. Une marmite dont on redemande du breuvage tant son goût nous interpelle, nous rend curieux, nous rend vivant, nous change, un petit peu. Une potion exigeante cependant, et qui implique de se poser certaines questions – en amont – sur ses motivations et ses envies.
D’ailleurs, en faisant des recherches sur le voyage humanitaire, je vous avoue que mes utopies en ont pris un coup.
J’ai vu des reportages et des articles tellement éloignés de ce que j’ai vécu avec l’agence Double Sens que je trouvais important de faire un article sur les pours et les contres du tourisme solidaire, sur les points importants à vérifier avant de partir tête baissée avec n’importe quelle structure. Oui, voyager autrement en famille est une expérience à partager au moins une fois dans sa vie avec ses enfants. Oui, le tourisme durable est une invention géniale pour rapprocher les peuples et partager de manière authentique de jolies choses avec la population locale. Non, il n’est pas fait pour sauver le monde et ne doit pas se faire à n’importe quel prix ! Voyager autrement : voici le mode d’emploi.
Voyage solidaire : 2 manières différentes de voyager autrement en famille
Par où commencer sur ce vaste sujet… par le commencement peut-être : je suis partie avec Double Sens tester grandeur nature leur « concept » de voyage solidaire axé sur le partage et l’immersion.
Cela fait une grosse année que je connais Aurélien, un des deux fondateurs, entrepreneur et engagé. Ce qui m’a séduit rapidement dans son projet, c’est le fait que pendant 6 ans, Double Sens n’a pas souhaité proposer d’autres destinations que le Bénin. Ils préféraient être certains du modèle avant de le dupliquer sur d’autres pays.
Aurélien et son associé ont par ailleurs vécu au Bénin pendant quelques années pour être au plus près des réalités locales, comprendre au mieux les impacts. Ils y ont fondé une association, créé un bar, bref, investi personnellement du temps, de l’argent, de la sueur !
Le point le plus important était rempli pour moi : j’avais confiance dans la sincérité de leur démarche. On est en droit de se poser la question, tant d’autres ont déjà fait preuve d’opportunisme sur le sujet du développement durable.
Voyager autrement en famille : ça s’apprend !
Au début du voyage, la réalité m’a cependant un peu rattrapée. En voyageant au plus près des populations locales, on voyage nécessairement dans des conditions plus simples que je n’ai l’habitude de le faire (j’aime les petits hébergements de charme, on en me refera pas !). Mes enfants n’étaient pas avec moi pour cette première fois au Bénin mais je me demandais en permanence lors des premiers jours sur les routes (j’ai commencé par visiter le Bénin en mobylette) : prendraient-ils du plaisir ? Ne seraient-ils pas un peu bousculés ? Ne sont-ils pas trop jeunes ?
Double Sens mixe souvent un séjour itinérant alternatif comme celui-ci, avec un séjour en immersion (on participe à une action pour soutenir un projet local). Nous devions donc ensuite passer du temps à Ouidah dans l’école solidaire de Modeste. Là encore, je me demandais si nous aimerions rester plusieurs jours au même endroit, nous qui avons l’habitude de bouger tous les 2/3 jours quand on voyage en famille. Bref, je me posais beaucoup de questions :).
Et puis, rapidement, la magie a opéré. En voyageant plus doucement, plus en contact avec les gens, les amitiés se font : Alphonse (notre guide), Modeste, les autres voyageurs avec qui on partage l’expérience… les liens humains et les moments partagés se mettent à devenir plus importants que le reste, à devenir l’essentiel même du voyage. Voyager autrement, ça s’apprend.
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Voyager autrement, c’est aussi déplacer le curseur des attentes
D’ailleurs, au fur et à mesure, mes attentes ont changé. Je ne recherchais plus la même chose qu’en arrivant au Bénin, le curseur s’était déplacé. Plus les jours passaient à sillonner le Bénin en rigolant sur ma mobylette, plus les heures passaient au côté de Modeste et de ses apprentis cuisiniers, plus je me disais « en fait, je veux revenir avec mes enfants. Je veux absolument partager avec eux la découverte que je viens de faire, le plaisir que j’ai eu à voyager autrement ! ».
J’ai pris conscience que nous voyageons pour découvrir le monde mais aussi pour nous retrouver en cocon, tous les 4. C’est très contradictoire et un peu égoïste, mais nous continuerons à le faire… Pourquoi cependant ne pas alterner de temps à autres avec des séjours où l’on est tous les 4 tournés ensemble vers autre chose ?! Ce serait un mix, un compromis parfait, surtout avec mes enfants qui grandissent ! On revient donc à notre question de départ :
Comment voyager autrement ?
Réfléchir à deux fois avant de choisir un orphelinat
Première chose, je bannirais autant que possible l’engagement auprès d’enfants dans des écoles ou des orphelinats. C’est peut-être la première action à laquelle on pense lorsque souhaite voyager autrement en famille. Pourtant, à moins d’avoir des compétences particulières en la matière, de penser son engagement sur le long terme, ou de constituer un petit plus aux côtés d’une équipe pédagogique locale pérenne, on peut se poser la question de l’effet néfaste et pernicieux d’un tel voyage solidaire. Au mieux les enfants sont « éduqués » par des gens sans formation à la petite enfance qui passent une semaine et qui s’en vont, sans qu’aucun suivi ne soit réalisé. Au pire, ils tombent sur des gens malveillants.
En France, que diriez-vous si des touristes devenaient les éducateurs de vos enfants ? Si on ne demandait pas d’autres garanties à ces « profs d’un jour », que celles de pouvoir se payer le voyage ? Si leurs têtes changeaient en permanence ?
Arriver dans un état d’esprit d’échange avant tout
Deuxièmement, il faut se faire à l’idée qu’on ne part pas 2 semaines pour changer le monde. Il serait vraiment contreproductif d’arriver dans la peau du sauveur, de l’apporteur de solutions toutes faites. Cela génèrerait des situations de dépendance que personne ne souhaite. Le voyage alternatif est une opportunité de partager des projets avec des gens locaux, de vivre à leur rythme. C’est aussi l’occasion (en passant par des agences sérieuses) d’investir dans un séjour qui profitera réellement au développement économique ou social local. C’est déjà pas mal, non ?
Préférer les projets qui cherchent à s’autofinancer au delà de vous
Enfin, l’idéal est de choisir un projet qui cherche à s’autofinancer en parallèle du voyageur. L’exemple de l’école de cuisine de Modeste à Ouidah, dans laquelle j’ai eu l’occasion de rester quelques jours, illustre parfaitement cela. Le business modèle de cette entreprise solidaire repose sur la venue des voyageurs qui peuvent ici dormir et manger les petits plats des apprentis formés gratuitement par Modeste. Ceux qui le souhaitent peuvent également parler gastronomie et faire des recettes avec les jeunes. On en sort tous grandis ! Double Sens soutient cette initiative en envoyant des voyageurs et en prenant en charge pour l’instant (le projet vient de démarrer) le salaire de Modeste. Mais demain, on peut espérer que la location des cases et des repas auto-financent en grande partie l’école !
Pour conclure avant de voyager autrement 😉
Mes premiers pas dans le voyage solidaire ont généré beaucoup de questions (le voyage doit aussi servir à cela : se remettre en cause) mais aussi de nouvelles vocations et beaucoup de bonheur. Je ne sais pas encore quand et comment je retournerai boire dans cette marmite, mais j’y retournerai !
Double Sens propose en parallèle de ses circuits solidaires habituels, des voyages alternatifs qui permettent de vivre le pays de l’intérieur, sans participer à une action locale. C’est peut-être une expérience à mi-chemin avec un tourisme dont on a plus l’habitude et qui permet de commencer à voyager autrement en famille ?
Enfin, je voulais préciser que ces quelques lignes n’ont pas la prétention de faire le tour d’un sujet compliqué. Mon intention est simplement d’expliquer qu’il est important de réfléchir en amont sur ses motivations et de challenger l’impact réel du voyage solidaire que vous aurez choisi de faire…
=> lire aussi le récit de mon voyage au Bénin
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Maman aventurière de 2 enfants, j’ai créé Voyage Family en 2015 pour partager ma passion du voyage avec enfant et bébé, vous inspirer, et vous aider concrètement à organiser vos vacances et vos week-ends en famille. Les enfants qui voyagent en conscience seront les citoyens curieux et ouverts dont nos sociétés ont besoin… offrons-leur cette chance et partageons-la avec eux : rejoignez la communauté Voyage Family et retrouvez tous les parents voyageurs sur les réseaux sociaux !
A très vite, Caroline